Nous avons vu dans le chapitre précédent, que le spectre musical comprend une étendue de 120 notes, étalées sur 10 octaves. L'oreille humaine ne peut pas entendre des sons au-delà de cette étendue.
Il y a une note qui a une importance fondamentale. Il s'agit du Do central, appelé Do de la serrure, car il se trouve face à la serrure des pianos.
Cette note est très importante car elle sert de référence à beaucoup de choses.
Tout d'abord, toutes les voix humaines y arrivent. Pour les hommes, c'est une note plutôt aiguë. Pour les femmes, c'est une note plutôt grave. Mais à l'écoute, il s'agit d'une note moyenne, ni grave ni aiguë. Elle indique un point de référence de la notation musicale comme nous allons le voir.
Les quatre octaves autour du Do central (deux en dessus et deux au-dessous) englobent le "Registre expressif". Cela correspond plus ou moins au registre du chant par les voix humaines, hommes ou femmes.
Ce dessin donne une idée de l'aspect qu'aurait un clavier maître de synthétiseur si on voulait accéder à toutes les notes audibles sans faire de transpositions. On voit très bien que les 127 valeurs des codes MIDI "note on-off" sont plus que suffisants pour reproduire la totalité des notes musicales car seules 120 sont théoriquement audibles par l'oreille humaine.
Le "registre expressif" est prioritaire pour la composition de la musique. Les 95 % de musique existante, voire plus, sont écrites à l'intérieur de ce registre. Toutes les mélodies chantées, tous les accompagnements (à exception de la basse qui descend d'une octave ou plus), et la plupart de la matière orchestrale y sont.
Lorsqu'on met ses mains sur un clavier pour improviser ou pour accompagner, on va instinctivement vers le milieu du clavier, autour du Do central, et non pas dans les extrêmes.
Cependant l'étendue qui dépasse le registre expressif n'est pas pour autant inutile. On ajoute des notes vers le grave pour donner du corps et de l'épaisseur à la musique. Tout le monde sait comment une basse ajoute une couleur virile et un rythme particulier à la sonorité d'un morceau.
Les aigus, c'est une autre question ; les deux octaves supérieures, à partir de 4.000 Hz existent naturellement dans toute musique en tant que fréquences harmoniques de la plupart des sons. Ce sont ces fréquences qui donneront au son toute sa brillance et à la voix humaine sa compréhension, mais rares sont les musiciens qui iront chercher aussi haut de la matière pour s'exprimer.
Les notes situées en deçà, entre la limite supérieure du registre expressif et les deux octaves supérieures mentionnées, sont souvent utilisées soit pour des effets spéciaux soit pour doubler à l'octave supérieure des mélodies utilisées à l'intérieur du registre expressif donnant ainsi de la brillance à l'orchestration.
La portée
Depuis longtemps les musiciens ont conscience de la priorité du registre expressif par rapport au reste du spectre musical. Et cette conscience se manifeste au moment de l'élaboration de la notation musicale.
Nous connaissons déjà les portées en clé de Sol et de Fa, nous connaissons aussi d'autres clés telles que celle d'Ut, et nous verrons à quoi sert tout cela à la lumière du Registre expressif.
Nous partons d'une superportée à onze lignes, dans laquelle nous décidons que celle du milieu correspond au Do central.
Un rapide calcul nous permet de constater que les clés de Sol et de Fa se trouvent respectivement deux lignes plus haut et deux lignes plus bas. C'est à dire cinq notes (une quinte) plus haut et plus bas.
Par ailleurs, nous pouvons constater que cette superportée nous permet d'englober d'un coup presque quatre octaves : les quatres autour du Do central qui constituent le Registre expressif.
Or l'inconvénient est la difficulté pour repérer, dans toutes ces lignes, une note avec la précision et la rapidité nécessaire pour la lecture.
Il suffit d'effacer la ligne du milieu pour que tout devienne plus clair et retrouver ainsi un paysage qui nous est familier.
Ceci explique pourquoi les instruments graves qui jouent au-dessous du Do Central, tel que la basse, s'écrivent en clé de Fa et pourquoi les instruments aigus qui jouent au-dessus du do central s'écrivent en clé de Sol.
Dans la pratique du clavier on écarte les deux portées pour pouvoir délimiter avec plus de précision le territoire de chaque main. Et on complète avec des lignes supplémentaires.
Ce passage...
Est exactement le même que celui-ci :
Mais revenons à notre superportée de onze lignes. Si nous ajoutons deux lignes supplémentaires en haut et en bas, nous avons de Do à Do les quatre octaves de notre registre expressif.
Dans cette dernière figure on a effacé la ligne du Do central pour des raisons de clarté.
Rien n'empêche désormais que nous écrivions de la musique sur deux portées avec un simple écart d'une ligne.
Certains auteurs pour le piano l'ont compris ainsi et ils présentent cette double portée (Fa et Sol) de la manière suivante :
Pour indiquer avec cette clé d'Ut (le nom ancien du Do) l'endroit où se trouve le Do central. Car cette clé d'Ut représente justement le Do central.
Certains instruments qui n'ont pas une étendue qui exige l'écriture sur deux portées, s'écrivent sur une seule.
Les différentes clés (de Sol, de Fa, d'Ut en troisième ligne) ne représentent qu'une partie de la superportée à onze lignes dans laquelle on a effacé des lignes contenant des notes peu usuelles.
C'est le cas de l'Alto qui s'écrit en clé d'Ut en troisième ligne.
Dans laquelle on peut reconnaître la figure précédente avec sa ligne du Do central pleine et sans les trois lignes d'en dessus et en dessous.
Il y a d'autres clés, d'Ut en première, en seconde, en troisième (ci-dessus) et en quatrième ligne. De même il existe une clé de Fa en troisième ligne et une clé de Sol en première.
Elles sont toutes tombées en désuétude et n'ont pas d'autre utilité que de lire des partitions anciennes.
De toute façon, celui qui voudra les étudier verra leur apprentissage facilité en les imaginant à leur place dans une super portée dont on a effacé les lignes inutiles.
Pour les nécessités de notre cours et de la composition ou orchestration actuelle, seules les clés de Sol et de Fa seront nécessaires, et la clé d'Ut en troisième si on veut écrire pour l'Alto.
L'avenir est à la simplification et cela se voit de plus en plus chez les compositeurs actuels désireux de ne pas s'encombrer l'esprit et celui de leurs partenaires.